N'allez surtout rien imaginer : je sais que j'ai déjà passé le réveillon avec lui, alors prendre le petit-déjeuner (café crème pour lui, café allongé pour moi) peut laisser sous-entendre... mais non.
Jonathan Lambert est un homme ordinaire. Il est marié depuis toujours. Il ne fait pas la fête de façon déjantée. Il n'est pas un "pipole". Autant que possible, il mène une vie "normale". Engageant, n'est-ce pas ?
Mais Jonathan Lambert est - aussi - un artiste. Et c'est bien pour discuter de cela que je le revoyais.
Comme je l'avais déjà pressenti et précisé dans mon précédent article, Jonathan n'a pas pris la grosse tête, il est abordable (tiens ça peut donner adorable aussi ;) et a pris le temps d'échanger simplement avec moi.
La scène, comme la salle de sport pour d'autres, est son défouloir. Après avoir été le chanteur et guitariste (auteur-compositeur-interprète) d'un groupe de Rock au doux nom d'Article 1, il a préféré la comédie et a réussi le concours d'entrée du Conservatoire du Xème arrondissement de Paris (d'où sont sorties -entre autres- Valérie Lemercier et Juliette Binoche). Recruté à la télé, les premiers symptômes de "schizophrénie" sont apparus lorsqu'il a du gérer à la fois la mise en boîte de sujets formatés pour une grande chaîne et exister au milieu d'une équipe déjantée sur une chaîne câblée. Ce qu'il ne pouvait dire et faire sur l'une... il l'a reporté de façon décalée sur l'autre. Alors forcément, lorsque vous voyez la galerie de portraits, vous imaginez les dégâts ;)
Remerciant ses parents pour l'éducation spectaculaire (c'est-à-dire qu'il a eu la chance d'aller souvent au spectacle) qu'ils lui ont donnée, s'il admet des influences aussi éclectiques que Farid Chopel, Django Edwards ou Michel Boujenah, il reconnaît que son modèle incontesté reste le spectacle "Colères" de François Rollin - et on le comprend !
Sur sa route il a eu la chance de trouver la chaîne Comédie ! qui lui a offert une grande liberté et Arnaud Lemort pour co-signer ses textes et le mettre en scène. Par le biais de sa maison de production Juste pour Rire, il a remis les pieds à la télé pour s'imposer comme l'humoriste que l'on connaît, en intégrant l'équipe de Laurent Ruquier, qui là encore - fait extrêmement rare à la télé - lui laisse entière latitude pour créer ses personnages. Il faut dire que le concept du "personnage du passé totalement barré qui vient nous présenter la personnalité interviewée sous un angle différent" avait de quoi séduire par sa fraîcheur et sa nouveauté.
Dans la mise en œuvre, tout est chronométré et la force du personnage repose sur le fond des informations dont il dispose face à l'invité : il en va de sa crédibilité. Le personnage en question est parfois choisi sur la base d'une personne faisant réellement partie de l'histoire de l'invité - et cela donne par exemple la prof de piano à moustache de Michel Fuguain... Sinon, le personnage est créé en fonction des anecdotes à raconter. Le point de convergence est qu'ils passent tous par les filtres des imaginaires ajoutés de Jonathan et d'Arnaud... et ça ne pardonne pas, pour notre plus grand plaisir !
Mais comment cela se passe-t-il ? (les secrets de fabrication)
Entre deux émissions (en général enregistrées le jeudi), le vendredi ou le lundi au plus tard la production leur fournit la liste des invités et ils déterminent leur "cible". De là jusqu'à mercredi, une journaliste récolte toutes les informations possibles et (in)imaginables sur l'invité en question. Entre mercredi et jeudi, Arnaud et lui écrivent et inventent le personnage... Parmi les plus plébiscités : l'Oncle Sam, la jambe de bois face à Kersauzon, le black face à Marie Josée Perec, etc.
Le costume, le maquillage et les accessoires (jusqu'à une entrée en poney pour le Prince de Lu par exemple) font partie intégrante de l'opération, tant et si bien qu'il a fallu l'expérience du spectacle et de la scène à Jonathan pour vérifier le plus important : son pouvoir comique se limitait-il au décorum ou bien le possédait-il vraiment ? Le public lui a répondu depuis, heureusement.
Des projets ? Oui, plein ! D'une part, le spectacle de "L'homme qui ne dort jamais", après avoir été joué à Paris*, notamment au Casino de Paris et au Bataclan, est actuellement en tournée en Province : le fait que la boucle soit bientôt bouclée après presque trois ans, donne à penser à Jonathan qu'il est temps - peut-être - d'écrire le second... En février, il sera sur deux tournages pour incarner des seconds rôles... Quelques scénarios lui ont été récemment proposés... Mais Jonathan reste attaché à la télé, et pense qu'il y a encore des projets à proposer sur ce canal : il a donc sûrement des idées pour venir nous remuer la lucarne magique.
Mise à jour: Pierre Belaïsch, le directeur des programmes de Virgin 17 a annoncé mercredi dernier (le 28 janvier) dans l'émission de Jean-Marc Morandini sur Europe 1 l'arrivée de Jonathan Lambert avec un programme humoristique hebdomadaire, "à la fois burlesque et barré", de 26 minutes, basé sur le principe de sketchs dans lesquels l'humoriste incarnera à la fois son propre psy, et le patient.
A suivre....
* son spectacle a été initialement présenté et rôdé sur la scène du Trévise, d'abord dans le cadre de la scène ouverte du FIEALD (dont il salue le principe et dont il remercie encore aujourd'hui Thierry Manciet, son directeur, pour son coup de main sur les lumières), puis en show-case.