Dans la cour des artistes, les plus grands ne sont pas forcément ceux que l'on remarquent le plus rapidement.
Le comique est un art delicat, d'autant plus qu'on en minore souvent l'éclat (de rire) : "la différence entre un clown et un comique, c'est la taille des chaussures".
J'ajouterai qu'il y a aussi la taille du coeur : moi, j'ai toujours préféré les clown tristes...
Cette année, je savais ce que je voulais comme cadeau d'anniversaire, dès le moment où j'ai su que la première du nouveau spectacle de Rousseau (dommage qu'il ne s'appelle pas Voltaire... juste pour la rime ;) ) coincidait à 24h près avec ma date de naissance.
Stéphane Rousseau, j'ai du le croiser la première fois dans le métro : sur les affiches de Chicago, que j'ai raté. Il faut savoir que moi et les musicals de Broadway, c'est une longue histoire d'amour...
Quelle n'a pas été ma surprise de le découvrir ensuite et assez systématiquement aux côtés d'un autre "petit jeune" qui débutait... un certain Franck Dubosc. Le contraste fonctionnait à merveille, certes, mais il était frustrant de ne pas l'avoir lui, tout seul.
Et puis, un soir en zappant, je suis tombée sur la rediffusion de son "one man show", et là j'ai compris la richesse de cet homme. Il y avait là un spectacle construit, original et surtout complet : un dispositif scénique permettant de jolies prouesses et surtout de créer cette aura poétique sur scène en proposant un univers ; un concept (avant les confessions nous avions déjà droit à son analyse ;) ) ; et puis une sorte de trinité incontournable : le chant, la danse, l'humour.
Posséder un talent est déjà chose rare, les posséder tous relève d'une grâce bien particulière. Même si le talent est là, pour Stéphane Rousseau il y a la qualité qui transforme tout le reste : le travail. Cet artiste complet ne s'arrête pas à la facilité : il cultive la difficulté dans le jeu, la subtilité dans les textes et l'interprétation.
Dans les Confessions, il le dit lui-même, il se met à nu : ce dévoilement qui a toujours été présent en partie dans son travail, touche une profondeur d'une grande force dans ce spectacle. La grâce le touche et nous touche parce qu'il possède également les doses exactes d'humilité et de pudeur nécessaires pour servir son spectacle. Sans cela, il ne pourrait pas nous faire une interprétation de David Bowie aussi belle, ni nous tenir aussi fort avec la mort de son père.
La bande-son de ce show est prodigieuse et la dextérité vocale de Stéphane Rousseau doit pouvoir faire taire ceux qui ne comprennent pas encore le besoin de proposer des spectacles "multi-expressionistes" : cette fois-ci, à défaut de la danse, c'est le dessin qui est venu s'ajouter à la palette de l'artiste...
Mais au-delà de toutes ces considérations, Les Confessions de Rousseau offrent un vrai show d'entertainment, un véritable feu d'artifice comique : les rires dans la salle fusent à la vitesse des lumières des projecteurs et les vagues de plaisir du public se propagent intensément. La loufoquerie vient certainement en partie déjà, pour nous Parisiens, du décalage culturel et de l'accent québecois ; mais l'écriture est belle, et bien là. Tout auteur sait que la vie est certes un matérieau idéal, mais il faut savoir le présenter de manière à faire rire : le style fait la différence.
J'ai passé un moment merveilleux, parce que la promesse qui résidait déjà dans son "one man show" était encore là et poussée encore un cran plus haut : ces Confessions sont un très beau cadeau !
Pour prolonger le cadeau et toujours grâce à la complicité d'Emilie, voici l'interview que Stéphane a eu la gentillesse de m'accorder - en 2 parties : nous avons eu une conversation à bâtons rompus rendant la coupure impossible, mais YouTube limite à 15mn, excusez le "cut sauvage" ;) (merci à Bertrand pour m'avoir aidée / merci à mon frangin pour le prêt de matériel et les incrust' textes).